Paris : Censure motion vote and weekly question session to the government at the National Assembly
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Budget 2025 : le détail des impôts et des dépenses, après l’accord trouvé entre députés et sénateurs

La commission mixte paritaire est parvenue à un compromis le 31 janvier sur le projet de loi de finances. Public Sénat récapitule les grands points à savoir sur l’évolution sur la fiscalité mais également les économies sur le budget de l’Etat. Ces choix doivent faire l’objet d’un nouveau vote à risque au Parlement cette semaine. Le gouvernement engagera sa responsabilité ce lundi et une motion de censure devrait être débattue mercredi.
Guillaume Jacquot

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Où en est le contenu du budget 2025 ? Près de quatre mois se sont écoulés depuis la présentation en Conseil des ministres du gouvernement de Michel Barnier du projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Après un examen écourté cet automne à l’Assemblée nationale, pour cause de rejet de la partie sur les recettes, et une lecture au Sénat à cheval sur 2024 et 2025, conséquence de l’adoption d’une motion de censure, le projet de budget de l’État a connu de nouveaux ajustements en fin de semaine dernière.

Réunis sur deux journées en commission mixte paritaire (CMP), députés et sénateurs se sont accordés sur une version commune. C’est le fruit d’arbitrages entre les représentants de la coalition, majoritaires dans cette instance, avec certains signaux envoyés en direction des parlementaires socialistes.

Le sort du budget sera scellé mercredi

Les deux chambres du Parlement vont désormais devoir se prononcer chacune à leur tour cette semaine. Le sort de cette nouvelle copie budgétaire se joue ce lundi puisque les députés du Rassemblement national et le bureau national du Parti socialiste vont décider de la marche à suivre sur la motion de censure, qui suivra l’activation du 49.3 ce lundi. Cette motion fera l’objet d’un vote au palais Bourbon mercredi.

L’effort budgétaire est moins vif dans le texte de la CMP, qu’il ne l’était dans la version sénatoriale du 23 janvier, ou dans le projet initial du gouvernement Barnier. Il devrait permettre au déficit public d’être contenu à 5,4 % du PIB, un chiffre conforme aux objectifs du nouveau gouvernement, mais sensiblement éloigné de la trajectoire prévue cet automne. Michel Barnier et leurs ministres poursuivaient un objectif à 5 %.

Impôts : pas de bouleversements par rapport à cet automne

Sur le volet fiscal, il faut d’abord rappeler que le projet de loi de finances pour 2025 comporte l’habituelle indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation. Les différentes tranches vont être revalorisées de 1,8 %. Cette disposition n’était pas possible dans le cadre de la loi spéciale, qui a reconduit le cadre budgétaire de 2024 en attente d’une véritable loi de finances. Elle bénéficiera aux 18 millions de foyers fiscaux qui s’acquittent aujourd’hui, et évitera à près de 400 000 autres de les rejoindre.

Pour les plus hauts revenus (plus de 250 000 euros pour une personne seule ou plus de 500 000 pour un couple), il est toujours prévu d’instaurer un taux minimum d’impôt sur le revenu à 20 %. Cette « contribution différentielle » reste temporaire et doit rapporter deux milliards d’euros.

Le texte prévoit toujours une surtaxe sur l’impôt des plus grandes sociétés. Le produit attendu de cette contribution exceptionnelle est d’environ 8 milliards d’euros. Elle ne s’appliquera toutefois qu’en 2025, alors que le budget initial prévoyait déjà une reconduction pour 2026. Il en est de même pour la contribution exceptionnelle qui concerne le géant du fret maritime CMA-CGM.

Autre évolution : la taxe sur les transactions financières passe de 0,3 % à 0,4 %, de quoi rapporter près de 800 millions d’euros supplémentaires. Le taux retenu vendredi est moins élevé que celui voté au Sénat, à 0,5 %. L’alourdissement de la fiscalité sur les rachats d’actions figure également dans le texte de la CMP.

La fiscalité environnementale a également été préservée dans l’essentiel. Les parlementaires ont retenu le renforcement du malus sur les achats de véhicules thermiques, ou encore la hausse des taxes sur les chaudières à gaz. Comme nous l’indiquions jeudi, le relèvement des taxes sur les billets d’avion atterrit sur un niveau intermédiaire, à mi-chemin entre ce que voulait le Sénat et le gouvernement : 7,40 euros par billet pour une destination européenne. L’Etat devrait récupérer au moins 800 millions d’euros.

Dépenses des ministères : quelques coupes amoindries

D’un gouvernement à un autre, c’est surtout sur le volet des dépenses que les modifications ont été les plus nombreuses. Le coup de frein sur la dépense publique est notamment très visible sur des missions telles que la recherche et l’enseignement supérieur, la culture, l’aide publique au développement, l’agriculture ou encore l’écologie. La diminution de ce dernier est allégée de 300 millions d’euros par rapport aux crédits inscrits dans le texte du Sénat. 

Les parlementaires ont toutefois pu préserver, avec l’impulsion du gouvernement, le fonds de prévention des catastrophes naturelles ou encore le Fonds vert, qui finance les investissements dans la transition écologique dans les communes. À noter également le rétablissement des fonds nécessaires au fonctionnement de l’Agence bio, qui avaient été supprimés au Sénat.

Le budget des Outre-mer est, lui, revalorisé, en raison des besoins liés à la reconstruction de Mayotte, estimés à plus d’un milliard d’euros. S’agissant du ministère des Affaires étrangères, les parlementaires n’ont pas repris les amendements sénatoriaux visant à sanctuariser les dépenses pour l’influence française sur la scène internationale. Le président LR de la commission des Affaires étrangères et de la défense du Sénat dénonce ce lundi un « budget de la diplomatie sacrifié par la CMP ».

L’effort de 2,2 milliards d’euros que devront consentir les collectivités locales est calqué sur le texte issu du Sénat, qui avait choisi d’alléger les coupes de plus de la moitié, par rapport au projet du gouvernement Barnier.

La commission mixte paritaire a également retenu la création d’un versement mobilité étendu au niveau des régions, une contribution assurée par les entreprises qui n’est applicable aujourd’hui que dans les communautés de commune et, pour l’échelon régional, seulement en Île-de-France. Le taux a néanmoins été ramené de 0,2 % à 0,15 %.

Les départements auront la possibilité d’augmenter pendant trois ans le plafond des taxes sur les transactions immobilières de 0,5 point, sauf pour les primo-accédants. Plus aucune limitation de revenus n’est d’ailleurs prévue pour ces derniers.

Nouvelle baisse des dépenses consacrées au logement

Dans le même objectif de relance du logement, le prêt à taux zéro (PTZ) est bien étendu à tout le territoire, dans le neuf. La mission Cohésion des territoires, qui comprend les dépenses relatives au Logement, voit toutefois ses crédits diminuer encore après la CMP. Plus de 700 millions d’euros sont retirés en crédits de paiement, pour revenir à 23,1 milliards d’euros.

Concernant la fonction publique, la CMP a confirmé la diminution de l’indemnisation des fonctionnaires en arrêt maladie à 90 % de leur salaire. La mesure a été introduite par le gouvernement au Sénat. L’extension du délai de carence à trois jours, comme le prévoyait le précédent gouvernement, n’a pas été réintroduite. Dans l’Education nationale, la suppression de 4000 postes d’enseignants est retirée, mais ce maintien se fera au détriment d’une diminution d’autres engagements du ministère.

Point de divergence majeur entre la droite et la gauche, l’étendue des soins couverts par l’Aide médicale d’Etat (AME), destinée aux étrangers en situation irrégulière, reste finalement inchangée, contrairement à ce que défendait la majorité sénatoriale de droite et du centre. Le budget inscrit est toutefois en diminution de 111 millions d’euros, et reviendrait alors à son niveau de 2024 (1,3 milliards d’euros).

Face à la colère du secteur, la diminution du budget des Sports n’ira pas au-delà du montant déjà prévu à l’automne. La baisse s’explique en grande partie après le niveau exceptionnel fixé pour 2024, année olympique. Supprimé par le Sénat, le Service national universel (SNU) est finalement préservé par la commission mixte paritaire, mais n’échappe pas à une diminution de son budget.

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